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Législation - règlementation

La réforme de l’organisation judiciaire en France

Pour simplifier les procédures judiciaires et s’adapter aux nouvelles évolutions numériques, une réforme judiciaire est mise en œuvre depuis le 1er janvier 2020  portant sur l’organisation et le fonctionnement des juridictions civiles en France.

Un nouveau tribunal : le tribunal judiciaire

Les tribunaux  d’instance et de grande instance situés dans une même ville sont regroupés en une juridiction unique : le tribunal judiciaire.

Désormais, le tribunal judiciaire devient la seule juridiction de droit commun de première instance en matière civile, pénale et commerciale compétente pour les litiges n’ayant pas été attribués à une autre juridiction (exemples : tribunal de commerce, conseil de prud'hommes)
 
S’il existe plusieurs tribunaux judiciaires dans un même département, ceux-ci pourront être spécialisés pour les affaires complexes ou comptant un grand nombre de parties.

Le Tribunal de proximité ou chambre de proximité du tribunal judiciaire :

Une première modification, a ainsi été mise en place : si le TGI ou TI était situé dans la même commune, le tribunal judiciaire les remplace. Mais dans le cas contraire, un tribunal de proximité est institué à la place de l'ancien tribunal d'instance.

Selon les cas, l'affaire sera donc jugée au tribunal judiciaire ou au tribunal de proximité.

Le tribunal de proximité est compétent pour les actions personnelles ou mobilières jusqu’à 10 000 euros ainsi que pour les demandes indéterminées qui ont pour origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas cette somme.

La représentation par avocat n’est pas obligatoire.

Si le demandeur et le défendeur sont d'accord, la procédure peut se dérouler sans audience. A défaut, des débats ont lieu sous le contrôle du juge.

Sauf si le juge a prévu des règles spécifiques dans son jugement, ce dernier s'applique immédiatement.

Les parties peuvent toutefois le contester en faisant appel dans le délai d'un mois mais seulement si la somme en jeu est d'un montant supérieur à 5000 euros.

Si la somme est d'un montant inférieur, la seule contestation possible prend la forme d'un pourvoi en cassation qui doit être formé dans les 2 mois.

Une juridiction nationale de traitement dématérialisé des injonctions de payer :

Dans le cadre de cette réforme, il est  prévu d’assurer un traitement dématérialisé des requêtes en injonction de payer devant un tribunal compétent pour l’ensemble du territoire national.

Un tribunal judiciaire sera spécialement désigné au plus tard le 1er janvier 2021.

Rappelons que la procédure d’injonction de payer permet à un créancier de saisir une juridiction par voie de requête afin d’obtenir une décision de justice enjoignant au débiteur de verser les sommes dues.

Cette procédure se déroule sans audience : le créancier adresse un dossier au juge qui apprécie le bien-fondé de la demande. Si le débiteur conteste la décision dans le mois suivant la signification de l’ordonnance par un huissier de justice, les parties sont convoquées devant le juge pour un « débat contradictoire ».

Près de 500 000 requêtes en injonction de payer étaient délivrées chaque année devant la juridiction civile des TI et TGI et seules 4 % des requêtes faisaient l’objet d’une opposition. Ces requêtes étaient traitées dans 307 juridictions différentes sous forme de dossiers papier avec des pratiques très diverses d’un tribunal à un autre.

Les créanciers adresseront leur dossier par voie numérique.

Toutefois, les particuliers pourront encore saisir la juridiction par un formulaire papier…

Unification des modes de saisine :

Le décret simplifie les modes de saisine des juridictions. Il ne conserve que deux modes de saisine : l’assignation et la requête.

Le tribunal peut être saisi par simple requête lorsque le montant de la demande n'excède pas 5 000 € ou dans certaines matières fixées par la loi ou le règlement (par exemple en matière de tutelles ou d'autorité parentale).

Pour déterminer la valeur du litige, il faut prendre en compte le montant total des demandes. S’il n’est pas possible de chiffrer la valeur du litige, il faut saisir le tribunal par assignation.

Sauf motif légitime, la requête doit être précédée d'une tentative de conciliation, de médiation ou d'une procédure participative.

Cette requête peut être faite directement en ligne, depuis le site du Ministère de la justice : https://www.formulaires.service-public.fr/gf/cerfa_16042.do

Les modes alternatifs de règlement des différends :

La réforme élargit les cas de recours préalable obligatoire à un mode de résolution amiable des différends.

Exigé en cas de saisine du tribunal judiciaire, ce recours doit précéder toutes les demandes tendant au paiement d’une somme n’excédant pas un certain montant (en l’occurrence 5.000 euros)  mais aussi pour toutes demandes relatives à un conflit de voisinage.

De plus, il sera possible de recourir, au choix, à la conciliation par un conciliateur de justice, à la médiation telle que définie par l’article 21 de la loi du 8 février 1995, ou à la procédure participative.

L’open data des décisions judiciaires :

Enfin, Le décret n° 2020-797 du 29 juin 2020 relatif à la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives a été publié au Journal officiel du 30 juin 2020.

Rappelons tout d’abord qu’actuellement Légifrance ne diffuse environ que 3 à 4 % du total seulement des décisions judiciaires rendues

Le décret prévoit la création d’un site internet placé sous la responsabilité du Garde des Sceaux permettant la mise à la disposition du public des décisions de justice.

Le développement de la diffusion des décisions de justice sur internet permettra d’assurer l’accès de tous aux décisions de justice, tout en veillant à la sécurité des personnes et au respect de leur vie privée.

En effet, dans le cadre de la diffusion en open data, les nom et prénom des personnes physiques qui sont parties ou tiers seront occultés. Il est également prévu l’occultation de tout autre élément permettant d’identifier ces personnes ainsi que des magistrats et membres du greffe en cas de risque d’atteinte à leur sécurité et au respect de leur vie privée.

Grâce à l’intelligence artificielle et aux algorithmes, il sera possible de brasser un nombre très élevé de données et d’en tirer des statistiques intéressantes pour les justiciables et pour les avocats.

L’accès à ces données permettra de déduire les chances de perte ou de gain dans un procès, et même d’estimer une fourchette chiffrée des dommages et intérêts dans certains contentieux.

Espérons cependant que l’humain reste toujours au centre des décisions judiciaires rendues car aucun algorithme, aussi juste qu’il soit, ne saurait prendre en compte l’être en tant qu’individu unique, tant par sa pensée que par son parcours de vie.

 

Nathalie Rose, responsable pédagogique

 

 

Formations Ifpass en lien avec cet article :

AA016 - Procédure judiciaire dans la gestion des sinistres RC

AA062 - Stratégie contentieuse dans les sinistres IARD