Bien malin celui qui s’y retrouve aujourd'hui dans la jungle des explications des assureurs et de l'ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) quant aux éventuelles conséquences des placements en assurance vie face à la politique monétaire actuelle en matière de taux bas…
Nous allons pointer dans cet article toutes les contradictions qui font que bientôt les matelas retrouveront leur fonction secondaire (après garantir un bon sommeil) : cacher ses économies dessous…
Tout d’abord, il est à noter que le problème ne date pas d’hier… Dès 2015, Christian NOYER alors président de l'ACPR avait donné l’alerte lors de la publication du rapport annuel sur ce sujet : « l’aplatissement de la courbe des taux entraîne une baisse progressive et durable du rendement des actifs ce qui pénalise tout particulièrement les assureurs vie. Ces derniers seraient négativement impactés par une remontée brutale des taux si elle devait avoir lieu ».
Pourtant paradoxalement en 2017 et 2018, la solvabilité des acteurs français de l’épargne individuelle s’est améliorée !
Il est vrai qu’au cours de l’année 2019, certaines compagnies ont vu leur solvabilité s’effriter légèrement : par exemple la marge de solvabilité de la compagnie Allianz était à 157% au 30 Juin 2019 alors qu’elle était à 185% au 31 Mars 2019. Toutefois, elle reste à un niveau bien supérieur de celle exigée par la réglementation (100%).
Dans ce contexte, divers sons de cloche ont été entendus tout au long de l’année 2019 riche en contradictions et nous allons tenter d’en faire un condensé :
- L’ACPR « ouvre le bal » en s’inquiétant à nouveau de l’incidence de ces taux négatifs sur les fonds en euros et en recommandant aux assureurs de réduire la rémunération servie aux assurés. Elle a donc incité les assureurs à faire souscrire des contrats en unités de compte (UC). Chez Allianz depuis fin 2019 le mot d’ordre est donc le suivant : « 100% en fonds en euros pour les nouveaux contrats c’est fini ! »
- la compagnie Generali dans cette mouvance a estimé que le fonds obligataire (euros) à capital garanti a vécu et qu’il fallait à tout prix inciter les clients à investir leur épargne sur d’autres supports. De ce fait, la compagnie a remis notamment « sur le tapis » le fonds euro-croissance à mi -chemin entre les fonds euros et unités de compte crée en Septembre 2014 et qui n’avait pas rencontré son public.
- le PDG de Monceau Assurances avait pris le contrepied en annonçant qu’il ne baisserait pas forcément le taux de son principal fonds en euros et que le contrat Euro-croissance restait « une usine à gaz » même retouché par la récente loi Pacte. Il distribue effectivement une rémunération en hausse avec un taux de 2,20% sur un de ses produits en euros au lieu de 1,50% en 2018 !
Une étude récente de S&P Global Rating a mis en exergue que la période de taux bas n’entamait pas la solidité des assureurs européens. Tandis que des assureurs mutualistes ont demandé de tenir compte du choc des taux négatifs et d’appliquer les règles de solvabilité avec plus de souplesse. Ce qui a provoqué la colère de certaines associations d’épargnants qui se sont immédiatement insurgés contre cette demande d’assouplissement en y voyant une volonté de faire main basse sur leur argent ! De ce fait, les produits distribués par GAIPARE affichent finalement une excellente performance avec des rendements de l’ordre de 3% en 2019 au lieu de 3,10% en 2018.
Pour finir le tour d’horizon, l’ACPR en fin d’année 2019 effectuait du « rétropédalage » en annonçant que face aux compagnies incitées à développer des contrats en unités de compte, elle mettra la protection des épargnants au premier rang de ses priorités (laissant penser qu’il y aura des abus). C’est pourtant cette instance qui a prié les compagnies de laisser les contrats en euros de côté au nom de la protection de ces mêmes assurés !
Les rendements 2019 des assurances / banquiers pour les contrats vie en euros sont maintenant tous connus. L’érosion existe certes mais ce pourcentage reste bien au-dessus de celui du livret A (0,5% depuis le 1 Février dernier). Pour illustrer ces propos, nous pouvons prendre quelques exemples : LCL VIE annonce un taux de 1,70% (1,75% en 2018), MACIF : 1,80% (1,90% en 2018), MAAF VIE : 1,75% (1,85% en 2018).
En conclusion, en 2020, c’est l’assuré qui décidera comme toujours et on le sait, il veut du « solide » ! Ce n’est pas la réforme des retraites qui le changera au contraire ! Pour lui le « solide » c’est et cela restera du fonds en euros… ou le matelas !
Nathalie Jaussaud-Obitz, responsable pédagogique