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Loi sapin 2 : Des changements structurels restrictifs (partie 2)

 

II – Encadrer les rendements servis par les assureurs

En sus, la baisse enregistrée sur le marché des taux d’intérêt génère une problématique d’usage des réserves, également appelée « provision pour participation aux excédents » (PPE). À cet effet, le HCSF dispose désormais de moyens pour encadrer le recours à ce stock, ce qui implique, de facto, le déploiement de mesures astreignantes pouvant faire (encore) chuter, à terme, le niveau de rendement des fonds en euros.

A – Un usage plus restrictif des provisions pour participation aux excédents

Sous l’égide du Code des assurances, les assureurs sont en droit de constituer des provisions. De manière générale, ces ressources sont utilisées pour colmater les brèches crées par le manque de rendement généré par un fait conjoncturel.

Or, au cours de ces dernières années, les opérateurs ont dû puiser, de manière significative, dans leurs PPE afin de reconstituer et de doper la performance de leurs fonds en euros. Mais cette manœuvre est courtermiste. Outre le fait que ces ponctions finissent par faire baisser le niveau des PPE, elles contribuent à vider dangereusement les réserves de leur substance qui est celle de protéger l’épargne des assurés en cas de chocs majeurs.

Il existe donc bien un dilemme d’appréciation de la situation.

Avec la loi Sapin 2, le HCSF est autorisé à « moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices ». En somme, cette autorité peut obliger les assureurs à mettre les intérêts générés pendant une année en réserve et interdire l’usage de ceux qui sont déjà mis en provision.

FOCUS : Les Provisions pour participation aux excédents

Dans le cadre des assurances sur la vie, l’Article A-132-5 du Code des assurances autorise les entreprises à verser des participations aux bénéfices. Celles-ci sont composées de :

- 85% des bénéfices financiers. C’est le résultat de la différence :

. Entre les taux d’intérêts dont l’assureur crédite la provision mathématique et les taux des placements qu’il a effectués (bénéfice d’intérêt).

. Entre les plus-values et moins-values issues de la réalisation des valeurs de placement.

- 90% des bénéfices techniques (diminués des pertes techniques). C’est le résultat de la différence :

. Entre la mortalité effective et la mortalité théoriques des assurés.

. Entre les frais de gestion réels et frais de gestion prévisionnels.

Sur cette base, les assureurs peuvent garantir annuellement un taux de rendement global intégrant :

- Des intérêts techniques.

- Des participations aux bénéfices.

- Pour autant, et en vertu de l’article R.331-3 du Code des assurances, les assureurs vie possèdent la faculté de ne pas distribuer, immédiatement et totalement, la participation aux bénéfices prévue par la législation. Ils disposent, pour ce faire, d’un délai de huit ans. ?Durant cette période, ils peuvent la provisionner dans un compte appelé « Provision pour participation aux excédents ».

B – Des mesures appelées à accélérer la baisse des rendements

Aux yeux des autorités, les assureurs doivent s’organiser de manière durable et réaliste. Déjà à plusieurs reprises [1], l’ACPR et le Gouverneur de la Banque de France ont appelé ceux-ci à faire évoluer leur modèle économique.

Il devient résolument difficile de créer de la valeur avec des instruments financiers qui présentent des courbes de rendement continuellement en décroissance. Le choix n’est plus à faire. Il s’impose de lui-même. Faire 2%, « c’est imbattable mais c’est dangereux [2] » pour un placement « sans risque et liquide ».

Inscrire la baisse des taux dans leur mode de fonctionnement apparaît donc comme une mesure cohérente, responsable et utile. De là, les restrictions qui pèsent sur le recours aux PPE constituent une alerte, voire une forme de dissuasion, en cas de poursuite du système actuel de la politique des taux « élevés ».

Et par les effets conjugués, il semble irrémédiable que les rendements servis sur les fonds en euros continueront encore à baisser.

 

 

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Djamila Malki, Professeur d’économie

Tran Hoang Dieu, Responsable pédagogique

 

 

[1] Danièle Guinot, Les avertissements de la Banque de France sur l'assurance-vie, site internet : www.lefigaro.fr

[2] La loi Sapin 2 met-elle vraiment en danger votre assurance-vie, site internet : http://www.challenges.fr